Lorsque je me réveillais ce matin-là, le soleil éclairait déjà le camp de ses doux rayons. L'air était tout de même mordant, mais mon long pelage me protégeait aisément. Seule ma truffe me picotait légèrement au contact glacé de la température, surtout après avoir passé plusieurs heures sous ma queue touffue. Mon souffle, lui, état visible, comme un petit nuage discret dans l'air immobile. Je soupirais puis me levais en étirant mes muscles encore endoloris au passage. Je me demandais ce que cette journée me réservait, et si je l'apprécierais. Je fis ma toilette, minutieusement, et sortis ensuite de ma démarche souple.

Plusieurs félins vaquaient déjà à leurs occupations. Certains mangeaient, d'autres discutaient et quatre se préparaient à partir pour la chasse. Pour ma part, aujourd'hui, je n'avais nullement envie de rester au camp. Je n'avais aucune obligation d'aller chasser aujourd'hui, alors j'y irais seule. Ceci décidé, je me rendis au tas de gibier pour prélever un moineau que j'emportais à l'ombre d'un buisson. Je le déplumais soigneusement avant de mordre dans sa chair tendre à pleins crocs, savourant le liquide encore tiède qui coula le long de ma gorge.

Je terminai bien trop vite mon repas à mon goût, mais enterrai les restes sans trop me plaindre du si maigre oiseau. Je confiais le Camp à un guerrier expérimenté, lui demandant de prévenir mon lieutenant de mon absence s'il le voyait, et sortis d'un trot souple du campement. Je m'éloignais à travers la lande, sans trop me presser, flairant l'air avec attention. Bientôt, je sentis une odeur bien particulière, et surtout bien facile à attraper, pour des habitués de sa chasse comme moi. Un lapin. Il grignotait non loin, indiscret, audible, et même visible ! Je me mis en position, m'approchais sans bruit, et bondis. Mais il dût m'entendre ou me flairer, car il détala aussitôt. Je le poursuivis immédiatement, sans me poser de questions, me rapprochant de la frontière avec le Clan de la Rivière. Quand je fus assez proche, je bondis, d'un bond long et rapide, et retombais juste assez proche pour donner un coup de patte au lapin, le faire tomber et lui mordre la nuque. Nuque que je brisais nettement et simplement. Aussitôt, j'entrepris de l'enterrer ; je reviendrais le chercher plus tard.

Mais soudain, alors que je terminais mon œuvre, une odeurs bien trop proche à mon goût me parvint. Un félin du Clan de la Rivière. Un félin que je n'avais jamais flairé auparavant, ou du moins, auquel je n'avais pas prêté une grande attention. Je m'approchais, le vent face à moi, et bondis hors des fourrés pour atterrir juste à côté du-dit félin. Je le bousculais d'un puissant coup de patte et il perdit l'équilibre. Je le plaquais donc au sol, menaçante.

- Qui es-tu pour oser pénétrer dans le territoire du Clan du Vent ?

Ma voix était calme, mais froide et menaçante. Il paraissait bien jeune, ce félin... Sûrement un apprenti, ou alors un jeune guerrier fraîchement nommé. Mais peu m'importait pour l'instant, il était sur mes terres, et j'ignorais pourquoi.